1.2. l'enseignant est concepteur de sa pratique pédagogique
Dans la relation pédagogique, " l'autorité " dont
les enseignants sont
investis ne peut se fonder sur une affirmation de pouvoir mais sur
la
reconnaissance d'une légitimité du savoir. La relation
pédagogique demeure
essentielle car c'est d'elle que procèdent les réponses
aux questions que se
pose l'élève sur le monde et c'est elle qui finalement
conditionne le succès
de la formation.
La nécessité pour l'enseignement de contribuer à
la formation du jugement et
au sens des responsabilités individuelles s'impose de plus
en plus dans les
sociétés modernes si l'on veut que les élèves
soient plus tard capables
d'anticiper les changements et de s'y adapter en continuant à
apprendre tout
au long de leur vie. C'est le travail et le dialogue avec l'enseignant
qui
contribuent à développer le sens critique de l'élève.
L'enseignant, avec son groupe d'élèves dans sa classe;
est concepteur, et
non pas répétiteur. C'est lui qui doit établir
le mode de communication dans
lequel il se sent le plus à l'aise, c'est lui qui adapte
constamment son
cours, sa façon de transmettre son savoir en fonction des
élèves qu'il a en
face de lui, et de ses propres domaines d'excellence. L'enseignant
est en
permanence en situation de création, la relation qu'il entretient
avec sa
classe n'est jamais reproductible.
Cette relation connait des évolutions notamment avec l'introduction
progressive des nouvelles technologies. Si l'enseignant n'est plus
l'unique
émetteur de savoirs, il reste à la fois le référentiel
de savoir et le
concepteur de l'enseignement, de sa structuration, de sa transmission,
par
rapport au groupe d'élèves qui lui est confié.
Dans la classe, une structuration des activités est réalisée
à travers les
contenus et les programmes, mais la classe est également
une occasion de
constructions pédagogiques et in fine de relations sociales
dont la
dynamique, bien que normée, reste variable et variée.
La liberté pédagogique, qui constitue une réalité
et à laquelle l'enseignant
est très attaché, ne doit pas conduire l'institution
à l'abandonner face à
ses difficultés. Il faut l'aider à analyser ses pratiques,
à identifier ses
problèmes et à les résoudre. Il faut lui fournir
des outils9 afin qu'il ne
soit pas obligé de tout réinventer seul.
Conforter dans la classe la relation élève-professeur
ne résoudra pas toutes
les difficultés rencontrées dans l'exercice du métier
dont la responsabilité
s'étend d'ailleurs à l'ensemble des conditions d'apprentissage
de l'élève.
Il convient d'élargir le cadre de référence
à l'équipe, à l'établissement,
et pour ce faire accroître les compétences pour organiser
le travail en
commun.
Deux propositions peuvent être faites dans l'immédiat
:
Des formules d'incitation à la mobilité professionnelle
devraient être
trouvées, sans qu'elle soit pour autant rendue obligatoire
: pour
souhaitable qu'elle soit, la mobilité vécue comme
une contrainte perd en
effet beaucoup de ses avantages.
Toutes les fluidités entre les différentes formes,
lieux et disciplines
d'enseignement doivent être encouragées ; on pourrait
en particulier avoir
recours à la validation des acquis professionnels pour faciliter
le passage
d'une discipline d'enseignement à une autre, faciliter les
séjours à
l'étranger, organiser les retours après une période
de formation d'adultes,
réfléchir à une professionnalisation des tâches
d'évaluation (examens...)...
Mais, au delà, il s'agit bien de savoir gérer toutes
les formes de mobilité
entrantes et sortantes par rapport au métier d'enseignant
et de les
faciliter : passage par des périodes d'autres activités
professionnelles
dans les entreprises privées ou dans l'administration.
Dans ce cadre, le congé de formation professionnelle a gardé
toute sa
pertinence et de nouveaux moyens devraient pouvoir être accordés
à ce titre
sans que leur utilisation puisse prêter à contestation.
La circulation d'un type de fonction à un autre devrait être
facilité au
sein de la même administration, sur une base de réciprocité
: accès des
enseignants à des fonctions administratives, mais également
accès des
administratifs aux fonctions de chef d'établissement ou de
conseiller
principal d'éducation par exemple.
L'émergence de nouveaux métiers devrait être
étudiée, en particulier dans le
domaine des nouvelles technologies et dans celui des ressources
humaines.
Bien entendu, toutes les ressources qu'offre la réglementation
pour les
changements de corps et de statut doivent être utilisées,
mais leur lourdeur
n'est pas toujours adaptée aux besoins immédiats.
Les recteurs devraient
disposer de la possibilité d'organiser des changements d'affectation
ou de
fonction pour une durée temporaire, dans une perspective
dynamique de
gestion des carrières.
Il faut améliorer la prise en charge par l'institution de
l'ensemble de ces
possibilités et, en particulier, mieux gérer le retour
dans l'éducation
nationale en valorisant l'investissement personnel. Il faut également
instaurer plus de souplesse par une gestion plus rapprochée
des personnes.
- promouvoir une véritable politique de santé et de prévention
L'éducation nationale ne dispose d'aucune étude relative
à la santé de ses
agents en général, ni de ses enseignants12. Or aucune
politique sérieuse de
santé, incluant bien entendu la prévention, ne pourra
être menée sans une
identification préalable des besoins. Une enquête épidémiologique
devrait
être menée chez les fonctionnaires de l'éducation
nationale en général,
ainsi que chez les enseignants ; il est important en effet de disposer
d'études portant sur des populations distinctes, afin de
pouvoir analyser
les différences. Un rapprochement avec l'INSERM serait à
cet égard bienvenu.
Faute de moyens en personnels, le nombre de personnes vues chaque
année en visite médicale ne représente que 1 à
2 % des effectifs globaux. Seules de
grandes catégories de métiers sont identifiés
pour les personnels soumis à
un risque professionnel particulier, tels, pour les enseignants,
les
professeurs d'éducation physique et sportive. Les autres
personnels à risque
particulier ne sont pas identifiés ni suivis en médecine
de prévention
(femmes enceintes, personnels sur contrat à durée
déterminée, handicapés,
personnes présentant une pathologie particulière,
personnes de retour après
un congé de maladie de plus de trois semaines).
Les visites systématiques, au moins annuelles, prévues
pour les personnels à
risques, ne concernent que 5% d'entre elles, le statut vaccinal
n'est pas
contrôlé, les dépistages et examens complémentaires
sont inexistants.
Les activités sur les lieux de travail, qui devraient représenter
le tiers
du temps de travail du médecin de prévention, ne sont
pas assurées et le
suivi des personnels en difficulté est incomplet.
L'éducation nationale, plus gros employeur de France, devrait
avoir une
politique sanitaire et sociale exemplaire en faveur de ses personnels.
C'est
pourtant le département ministériel le plus en retard
pour la mise en place
d'une médecine de prévention qui ne doit pas seulement
être tournée vers les
élèves, mais qui doit également se préoccuper
des personnels13.
Les congés de maladie à répétition, les
congés de longue maladie et de
longue durée sont très souvent des symptômes
d'une difficulté majeure à
assumer les charges d'un enseignement, mais aussi d'une impossibilité
à
engager le dialogue avec un représentant de l'institution,
à quelque niveau
que ce soit.
Toutes les académies ont mis en place des réseaux
d'aide aux enseignants en
difficulté, mais trop souvent le recours à ces réseaux
est trop tardif pour
être pleinement efficace. Il faut accroître la vigilance
au niveau des
établissements et savoir dédramatiser les situations.
En ce domaine aussi,
le rôle des équipes pédagogiques peut être
déterminant.
Le signalement précoce des premières difficultés
doit permettre une aide
appropriée et rapide susceptible d'éviter une dégradation
rendant les
solutions plus problématiques. A chaque situation doit être
recherchée, à
partir d'une multiplicité d'approches, la solution la plus
adaptée.
Qu'il s'agisse de difficultés passagères ou de la
recherche de solutions à
des difficultés plus graves, les prises en charge médicales
doivent se
doubler d'un accompagnement et d'une aide associant les corps d'inspection
et les IUFM pour la mise en place de tutorats, de stages de remise
à niveau,
de stages de préparation à la reprise de fonctions.
Les réponses aux besoins en terme de réadaptation,
de réemploi, de
reclassement et de reconversion sont notoirement insuffisantes.
Le réemploi est une possibilité qui n'est offerte
qu'aux enseignants ayant
préalablement été placés en réadaptation.
La procédure reste gérée de façon
centralisée et le nombre de poste offerts, tous implantés
au CNED, est bien
inférieur aux besoins exprimés, en grande partie en
raison de leur
occupation sans limitation de durée par des personnes qui
peuvent prolonger
leur activité jusqu'à 65 ans.
Quant à la procédure de reclassement, elle n'est que
très rarement utilisée.
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